Citadelle, « place de guerre », puis « ville de garnisons », Valence est marquée par une histoire militaire dont les traces sont encore visibles dans l’urbanisme et l’architecture. Dès le 18e siècle, elle accueille plusieurs casernes afin de loger les troupes qui étaient jusqu’alors hébergées chez les habitants : caserne St-Félix, caserne Chareton, caserne Brunet et enfin la caserne Latour-Maubourg bâtie au 19e siècle en face du polygone d’artillerie, caserne transformée en 2021 en médiathèque.
Auteure
Viviane Rageau
L‘achèvement de la caserne Chareton coïncide avec le transfert définitif de l’école d’artillerie à Nîmes, sur ordre du ministre de la guerre. Cette nouvelle est vécue comme une profonde injustice par la Ville de Valence qui s’est engagée dans des dépenses démesurées, depuis plusieurs décennies, pour obtenir cette école définitivement et construire un parc militaire en conséquence. C’est pourquoi une délégation drômoise fait le voyage à Paris pour plaider la cause de Valence. La séance du conseil municipal du 17 mai 1876 rapporte le compte rendu du rendez-vous avec le ministre de la guerre, par le Maire de Valence. Celui-ci précise qu’en compensation, une cartoucherie nationale sera installée à Valence (en réalité sur la commune de Bourg-lès-Valence), de même qu’un nouveau régiment.Pourtant, les tractations sont laborieuses. En effet, Valence est en concurrence avec la ville de Vienne qui s’engage à participer avec plus d’ampleur aux dépenses. C’est pourquoi l’offre de Valence passe de 300 000 à 400 000 frs et la ville s’engage par ailleurs à renoncer au remboursement des sommes avancées pour l’accueil de l’école d’artillerie, sommes auxquelles elle est pourtant en droit de prétendre.
Le 17 mai 1876, le conseil municipal vote donc la somme de 400 000 francs pour la construction d’une caserne destinée au régiment d’artillerie promis en compensation de la perte de l’école d’artillerie et la délibération du 14 août suivant rapporte un décret dotant la garnison de Valence d’un régiment de cavalerie à la place du régiment d’artillerie promis. Enfin, le 16 août 1876, une dépêche ministérielle désigne Valence « ville de garnison d’un régiment de cavalerie du 14e corps d’armée ».
Le 14 mars 1877, les registres municipaux mentionnent « l’adjudication des travaux de la caserne de cavalerie à construire en bordure de la route de Romans, face au Polygone. » Elle sera construite sur des terrains acquis par la Ville en 1873, proche du faubourg Saint-Jacques. Cette nouvelle caserne illustre les principes de la caserne de cavalerie républicaine, conçue pour accueillir un régiment composé de 5 escadrons (715 hommes et 606 chevaux). Elle se compose d’un bâtiment central sur 3 niveaux pour le logement des soldats, de chaque côté les écuries dock pour les chevaux, d’un manège dans l’axe du quartier (actuellement université) et de plusieurs entités pour infirmerie des chevaux, maréchalerie, cour aux fumiers et hangar à munitions.
J. Plèche rapporte que les 21, 22 et 23 juin 1879, « la caserne de l’avenue de Romans étant achevée, le 5e régiment de chasseurs à cheval arrive en 3 colonnes. » Ce nouveau régiment confère à la ville le titre de « ville de garnison ». On compte dès lors à Valence 3000 militaires environ, contre 720 au début du XIXe siècle, soit un peu moins d’1/5 de la population totale de la ville.
Comptant ainsi parmi les villes militaires d’envergure, Valence accueille le général Boulanger de 1880 à 1882, commandant du 6ème régiment d’artillerie stationné à la caserne Chareton. C’est probablement le titre de « ville de garnison » qui explique la réorganisation des casernes de Valence qu’il propose en 1886, lorsqu’il est ministre de la guerre. Chaque caserne prend alors le nom d’un officier drômois s’étant illustré par le fait militaire : la caserne Saint-Félix devient caserne Championnet, la caserne de la citadelle devient caserne Chareton, la caserne du petit séminaire devient caserne Brunet et enfin la caserne Saint-Jacques devient caserne Latour-Maubourg (*).
» Valence, ville militaire », Les petites et grandes histoires,
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