Dans un souci d’échapper au domaine éditorial classique, les formes de publication et de diffusion se renouvellent de plus en plus, refusant de s’enfermer dans toute normativité tout en jouant avec les formes du livre ou du journal et avec les cultures underground. Aussi prennent-elles des aspects aussi différents que le fanzine (magazine réalisé par des auteurs indépendants, des amateurs, contraction de l’expression anglaise « fanatic magazine »), le zine (forme abrégée de « magazine » au contenu plus développé), la micro-édition, le poster, le comics ….

Un champ d’expérimentations inépuisables

Souvent créées en dehors des lieux institutionnels, ces nouvelles formes d’édition permettent un rythme de réalisation et de diffusion plus rapide, offrent une indépendance financière et facilitent l’auto-édition. Au-delà des questions esthétiques et économiques, elles ont pour objectif la vulgarisation d’idées, l’accessibilité d’un savoir par une mise en forme vivante, et surtout encouragent la diversité des auteurs et la réalisation collective. Comme le constate Coline Vernay (*) : « Cela permet la cohabitation de différentes formes de connaissances et donc de formes de vie dans un même objet ». On y trouve des informations, des analyses, des interviews, des enquêtes, des archives … associées à des recherches formelles et graphiques très inventives, imprimées ou en ligne.

Le design graphique trouve dans ces supports un large champ d’expérimentations et s’attache à innover dans la forme de la publication, le choix du support en dehors de tout format standard, de la typographie, dans la place de l’image, de la photographie, de la bande-dessinée…
Avec des titres très inventifs, ces nouvelles publications peuvent accompagner des expositions ou des événements comme la Biennale du design de Saint-Etienne (6 avril – 31 juillet 2022) qui édite différents supports dont le journal dessiné « La Navette » confié à chaque numéro à un étudiant du cycle Design Recherche (3e cycle de l’école supérieure d’art et design de Saint-Etienne). Elles sont également créées par des artistes qui en font des médiums artistiques à part entière, associant différents formats, supports comme une maquette de train à fabriquer dans la petite édition « Racconti. Moving landscape » ou le fanzine « BATO » d’Hérvé Di Rosa crée avec Robert Combas et Catherine Brindel, mêlant collages, photocopies, dessins… Enfin elles sont aussi réalisées comme outil de recherche et de communication scientifique pour les universitaires ou comme objet de création et de réflexion dans le cadre des Ecoles supérieures d’art et de design.

Les publications des écoles d’art, des outils de réflexions et de créations

La majorité des écoles supérieures d’art et de design publie leur propre revue comme en témoigne la longue liste des revues réalisée par l’association nationale des écoles supérieures d’art et design (ANDEA).
Leur forme ainsi que leur contenu sont infiniment variés et en correspondance avec leurs orientations pédagogiques. Parmi elles, on peut citer une revue imprimée de qualité, « Azimuts », qui se veut une revue de recherche en design fondée en 1991 par les étudiants-chercheurs du post-diplôme de l’École supérieure d’art et design de Saint-Étienne. Son intention est de recueillir « les points de vue de personnalités du monde du design, de la culture et de la recherche en général. Les numéros s’organisent autour de dossiers thématiques ayant trait au design et plus généralement à la culture matérielle ou à sa critique. La rubrique ​‘Varia’ accueille des contributions hors-dossier et la rubrique ​‘Anthologie’ permet de découvrir ou re-découvrir des textes et documents difficilement accessibles (soit épuisés, soit encore jamais traduits en langue française). La rubrique ​‘Comptes rendus’ est un espace de libre critique de l’actualité de la recherche en design et des publications du champ ».

Revue Azimuts n° 24 et 26

Parmi les revues numériques, « Pneu » est une nouvelle revue créée à l’école supérieure d’art et design de Valence en 2022. L’ESAD a une longue tradition de publication née dès 1976 avec le journal « Que ça dise pourquoi !  » (sous-titré « Journal de l’atelier de communication – l’image photographique ») réalisé avec les étudiants comme cela a été évoqué dans l’article du Numéro 3 de QUI+EST (article « Que ça dise pourquoi »). Depuis différentes formes d’éditions ont vu le jour dans cette école et dernièrement la revue numérique « Pneu » coordonnée par Samuel Vermeil, enseignant design graphique :
« Quatre lettres qui sonnent comme une onomatopée. Dans un souffle, nous voilà entre le garage et le temple, entre la roue et l’esprit, les vapeurs de l’essence et celles de l’encens.
Dans un espace ouvert entre le doute et l’assurance, les mots et les images, les signes et leurs lecteurs. Une empreinte à la surface poudreuse de l’écran. PNEU est une revue produite depuis l’Ecole d’art et design de Valence, par des étudiant.e.s du master design graphique. C’est un lieu où formaliser ses idées, écrire et partager. La plupart des textes et des articles rassemblés sont les témoins d’un travail de recherche en cours, d’une rencontre réalisée à l’occasion d’un atelier, d’une conférence, d’un voyage — réel ou « autour de ma chambre » ».