Le projet des « Sublimes routes du Vercors », porté par les Départements de la Drôme et de l’Isère, le Parc régional naturel du Vercors et six Communautés de communes du Vercors, interroge de plus en plus les habitants et les utilisateurs des routes de ce territoire. Avec son œil averti et son expérience de cycliste, Albert Cessieux pose la question des enjeux de ce projet, du développement durable et de la mobilité douce.
Auteur :
Albert Cessieux
Les routes du Vercors sont effectivement superbes et sublimes. Ces routes permettent les déplacements pour les habitants, leurs activités, l’accès au massif pour les visiteurs et touristes et tous ceux qui veulent aller au-delà et partir à pied à cheval, en ski, etc…, sur les chemins, les forêts, les crêtes, les Hauts plateaux et ils sont nombreux à apprécier ces lieux. Ces routes ne sont pas une fin en soi, sauf peut-être pour quelques personnes ayant perdu la mobilité individuelle. Aussi dans le cadre du projet des « Sublimes routes du Vercors », n’est-il pas aujourd’hui indécent de les valoriser avec seul objectif l’accès automobile ?
Il est vrai que le Col de la Bataille est un point de départ important pour accéder au Plateau d’Ambel, au Roc de Toulau et à la Tête de la Dame. Une amélioration du stationnement est utile mais la mise en place de structures belvédères est-elle vraiment indispensable ? Un chemin sur les Rochers de la Sausse pour conduire au pas en éliminant les barbelés envahissants, ne serait-il pas plus utile ?
Le Col du Rousset est aussi un point de départ vers le Col de Chironne par un superbe sentier et la valorisation de l’ancien tunnel est intéressante. La fréquentation des Cols de la Bataille et du Rousset est due à l’intérêt que constitue le point de départ de ces lieux pour aller plus loin à pied, sur le Plateau d’Ambel, au Roc de Toulau, à la Tête de la Dame. Si les propositions d’aménagement des Cols de la Bataille et du Rousset ont des aspects intéressants, ils ne peuvent être valorisés comme des fins en soi. Comment privilégier les mobilités alternatives à la voiture en faisant des aménagements aux cols ?
Inciter les voitures à faire certains itinéraires donnés n’est pas très raisonnable. Certaines routes sont étroites et difficiles pour les voitures. C’est le cas du circuit de Crest au Col des Limouches par Gigors et la Gervanne. Également pour les Gorges du Nan (ill. 1, 2), Les Coulmes, Pont-en-Royans. Augmenter le nombre de voitures sur ces routes, c’est aussi diminuer l’intérêt pour les faire à vélos. Aujourd’hui on y croise de temps en temps, à vélo, des cyclistes savoyards qui sont ravis de faire ces itinéraires beaucoup plus tranquilles que ceux qu’ils ont dans leur coin ! J’ai le souvenir d’une montée par la route de Combe Laval en famille avec des amis et des adolescents quand la route était fermée aux voitures : un régal ! Quand il y a trop de trafic, ce n’est pas agréable.
Aujourd’hui il semble qu’inciter l’attractivité automobile du Vercors ne peut pas être un objectif de société. Les routes du Vercors seront et resteront toujours belles et accessibles mais peut-être moins systématiquement et moins souvent.
En revanche, c’est dans les secteurs habités qu’il faut offrir aux habitants et aux visiteurs la possibilité de se déplacer à pied et à vélo. Prendre pour exemple ce qu’a réalisé la Communauté de Communes du Massif du Vercors (Autrans, Corrençon, Engins, Lans-en-Vercors, Méaudre, Saint-Nizier et Villard-de-Lans) avec le réseau de voies douces qui relie toutes les communes pour permettre aux habitants et touristes de se déplacer et de se promener d’un village à l’autre (ill. 3, 4).
Il serait important aujourd’hui de se préoccuper de développer une accessibilité au Vercors pour les déplacements doux ou actifs à partir des gares du territoire comme Saint-Hilaire- du-Rozier, Saint-Marcelin, Crest et Die.
Il semble que le Conseil Départemental de la Drôme et beaucoup d’élus limitent leur raisonnement à leur propre pratique essentiellement motorisée. Ils ont beaucoup de mal à comprendre l’appétence de la population pour la nécessité à se déplacer autrement. Pourtant c’est ce que l’on constate partout dès que des aménagements agréables et beaux sont proposés. Ces élus se limitent aujourd’hui à des déclarations sur le développement durable mais ont beaucoup de mal à les mettre en œuvre. Ils continuent à penser que le seul salut est de privilégier les routes. N’est-il pas plus important de donner la possibilité de se déplacer en sécurité autrement qu’en voiture pour la plupart de nos déplacements ?